Cinq jour après l'annonce du duc et de la duchesse de Sussex, qui a transformé le vent de fraîcheur qu'ils ont fait souffler sur la monarchie en véritable tempête, la souveraine de 93 ans a réuni un conseil de famille dans sa résidence de Sandringham, dans l'Est de l'Angleterre.
Elle a publié à l'issue une déclaration écrite personnelle, un mode de communication dont la rareté traduit l'ampleur de la crise qui ébranle la couronne face à la volonté du prince de 35 ans et de son épouse, ex-actrice américaine métisse de 38 ans, de prendre le large et de gagner de l'argent sans totalement tourner le dos à la monarchie.
Cheffe de l'Etat et cheffe de famille, la reine y assure qu'elle "soutient entièrement le désir d'Harry et Meghan de créer une nouvelle vie" avec leur fils de huit mois, Archie. "Même si nous aurions préféré qu'ils restent des membres de la famille royale à plein temps, nous respectons et comprenons leur volonté de mener une vie plus indépendante", affirme-t-elle dans ce texte transmise par le palais de Buckingham.
"Harry et Meghan ont été clairs sur le fait qu'ils ne veulent pas dépendre des fonds publics" et un accord a été trouvé sur "une période de transition" durant laquelle ils vivront entre le Royaume-Uni et le Canada, poursuit Elizabeth II.
Il reste "pour ma famille" du "travail à accomplir" sur ces "questions complexes", a ajouté la reine, à l'issue d'une réunion organisée avec son fils le prince Charles et son petit-fils aîné William.
Auteure d'une biographie du prince Harry, sixième dans l'ordre de succession au trône, Penny Junor a relevé la chaleur des mots de la reine, qu'elle a lus comme ceux d'une "grand-mère qui parle de sa famille".
Le Daily Mail a souligné la déception de la reine et vu dans la désignation des duc et duchesse de Sussex par leurs prénoms, en rupture avec le protocole, un signe qu'ils pourraient être déchus de leurs titres d'altesses royales. "Get Megxit done", titre le journal sur son site, détournant le "Get Brexit done" (réalisons le Brexit) du Premier ministre Boris Johnson.
- Qui va payer? -
La reine a demandé que les décisions finales aboutissent "dans les jours qui viennent" pour définir le statut inédit réclamé par le couple, qui veut garder un pied dans la monarchie (et certains avantages) tout en obtenant le droit de vivre de son travail et en vivant une partie de l'année en Amérique du Nord.
Parmi les sujets sur lesquels le palais de Buckingham devra trancher figure le montant de la dotation financière que le prince Charles attribue au couple depuis sa réserve personnelle. Meghan et Harry n'ont jusqu'ici officiellement renoncé qu'à leur part de l'allocation royale, laquelle ne représente que 5% de leurs revenus.
Il faut également déterminer de quelle protection policière ils pourront bénéficier et comment ils pourront gagner leur vie, sans conflit d'intérêt avec leur rang.
Ces derniers mois, Harry et Meghan n'avaient pas caché leur malaise face aux attaques des tabloïds sur leur train de vie et leur difficulté à trouver leur place dans la famille.
Le prince avait pris ses distances avec son frère. Il avait déménagé du palais de Kensington où il habitait auparavant avec William et Kate et avait rompu avec la fondation où les deux couples oeuvraient ensemble. Dans une interview télévisée diffusée en octobre, il avait dit que William et lui suivaient "des chemins différents" et que leurs relations traversaient parfois "des mauvais jours".
Affichant un front uni lundi, les deux fils du prince Charles et de "lady Di" ont publié un communiqué dénonçant une "fausse histoire" publiée par la presse sur leur relation et "l'utilisation offensante et potentiellement dangereuse" de mots "incendiaires".
S'ils ne précisent pas le journal concerné, le Times rapporte des témoignages affirmant qu'Harry s'était senti rejeté de la famille royale en raison de l'attitude "agressive" de son frère William qui n'aurait jamais accepté sa femme Meghan et aurait remis le couple à sa place de manière répétée.
S'ils n'obtenaient pas satisfaction, Harry et Meghan pourraient donner une interview télévisée à bâtons rompus aux conséquences potentiellement désastreuses, ont affirmé lundi plusieurs journaux. De quoi rappeler celle donnée par "Lady Di" en 1995, dévastatrice, dans laquelle elle s'épanchait sur les difficultés de sa vie au sein de la "firme", surnom de la famille royale.
L'image de la famille royale est déjà ternie par les liens du prince Andrew, deuxième fils de la reine, avec le financier pédophile américain Jeffrey Epstein, qui s'est suicidé en août 2019 en prison où il attendait son deuxième procès pour agressions sexuelles sur mineures.